Le Congrès régional de la Mobilité des Marchandises du SPW MI a rassemblé 170 acteurs du secteur le 17 novembre dernier à Liège. Retour sur cet événement dont AKT for Wallonia et sa Cellule Mobilité étaient partenaires et qui visait à faire le bilan de la Stratégie régionale de Mobilité mais aussi à préparer le futur.
Le congrès s'est déroulé en deux temps : un moment de communication le matin en séance plénière et des échanges et de la coconstruction l'après-midi avec des tables rondes thématiques.

Faire le bilan
En introduction de la journée, la Direction du Transport et de l'Intermodalité des Marchandises du SPW MI avait invité Sébastien Brunet, directeur de l'IWEPS. Il a planté le décors en rappelant les finalités poursuivies par la vision FAST 2030 de la Wallonie : réduction de la congestion (Fluidité), accès aux biens et services pour tous (Accessibilité), réduction drastique des accidents de la route (Sécurité) et réduction importante des nuisances environnementales (Santé). Une vision traduite en deux volets sous la forme d'une stratégie, l'une pour les personnes, l'autre pour les marchandises. La Stratégie Régionale de Mobilité – Volet Marchandises (SRM/M) définit donc pour le secteur comment atteindre les objectifs de la vision FAST. La SRM constitue un cadre de référence pour orienter les décisions et plans d’actions, avec une traduction de la vision en objectifs opérationnels : réduction des émissions et des impacts, rééquilibrage des parts modales, amélioration de l’efficacité du système mais aussi modération et plafonnement de la demande.
Le bilan de cette stratégie et les nouveautés mises en place depuis le 1er congrès (2023) étaient ensuite présentés par le directeur général du SPW MI, Pol Flamend. Il fut question d’innovation (bateaux autonomes), de partage des connaissances (bonnes pratiques en matière de logistique locale), d'infrastructures (voies hydrauliques), mais aussi d’accompagnement et de sensibilisation des entreprises. Toutefois, le Tableau de bord de la mobilité, qui vient tout juste d’être publié, est sans équivoque : les indicateurs ne vont pas dans le bon sens.
La matinée fut aussi l’occasion de présenter les conclusions du groupe de travail « Préparer le futur » piloté par Logistics in Wallonia (8 projets sélectionnés) et d'introduire le nouveau GT « Fret Forward Wallonia » (avec Dreamocracy et Ptolemus à la manoeuvre) consacré à la décarbonation, la multimodalité et la sécurité du transport de marchandises. Les participants auront deux ans pour donner une dynamique et un plan d’actions à la SRM/M sur ces thématiques.
"La logistique n’est pas une variable d’ajustement, elle est un levier stratégique de compétitivité, de réindustrialisation, mais aussi de durabilité pour la Wallonie."
Frédéric Panier (CEO AKT for Wallonia)
Présenter des actions
La suite de la matinée fut consacrée à la présentation d’actions ciblées et au partage d’expériences :
- La Belgian Cycle Logistics Federation a présenté des projets de cyclologistique, démontrant leur efficacité opérationnelle, leur complémentarité au sein du secteur des transports, leur impact et leur viabilité économique et leur contribution à des villes durables.
- Pour le secteur public, le SPW MI s'est attaché à montrer comment il tente de limiter les impacts sur la mobilité et l'empreinte environnementale de ses chantiers routiers.
- Pour le secteur privé, ce fut l'exemple d'Holcim qui, pour éviter de nombreux déplacements en camions entre deux de ses carrières et les quais d'embarquement des péniches, envisage de construire des bandes transporteuses qui amèneront directement les granulats sur les bateaux.
La matinée s'est poursuivie par la présentation du Comité d'orientation stratégique de la SRM/M, l’intervention de la porte-parole de François Desquesnes, Vice-Président et Ministre wallon du Territoire, des Infrastructures, de la Mobilité et des Pouvoirs Locaux et par les propositions d'AKT for Wallonia face aux défis de la SRM/M.
Des ateliers d’intelligence collective
L’après-midi fut dédiée à 4 ateliers d’intelligence collective où les idées, réflexions et contributions ont été précieuses et vont nourrir les travaux en cours. Impliquer des acteurs est essentiel si l'on veut construire des solutions concrètes et adaptées aux enjeux de mobilité de notre territoire.
Mobilité locale des marchandises
Une vingtaine de participants se sont penchés sur les actions à mener pour améliorer la mobilité locale des marchandises. Ils ont proposé des actions pour les pouvoirs publics mais aussi pour les acteurs privés. Après une phase de brainstorming, trois actions ont été sélectionnées comme prioritaires et les participants ont pu proposer des plans d’actions pour chacune.
Pour sensibiliser les acteurs locaux et commerçants, il est proposé de construire un label axé sur la mobilité locale, de réaliser des capsules vidéo de sensibilisation et une Semaine de la Mobilité sur les marchandises.
La deuxième action concerne la réglementation d’accès aux centres-villes. Un inventaire des mesures déjà en place dans les villes et communes serait nécessaire avant de standardiser les zones de livraison. Cela permettra de rendre les règles plus claires pour les logisticiens, tout en s’adaptant aux spécificités locales.
Pour finir, les participants se sont penchés sur les hub pour les colis. L’accès à ces hubs doit être possible pour tous les acteurs du secteur et via un réseau dense de hub. Il est nécessaire que la livraison dans les hubs soit plus intéressante pour le consommateur et la traçabilité des colis assurée. Ces hubs pourraient aussi être combinés à des distributeurs (nourriture, boisson, pain…).
Toutes les idées et discussions permettront aussi au SPW de rédiger la nouvelle stratégie régionale de mobilité des marchandises.
La pénurie de main d'œuvre pour les enjeux de la stratégie
Selon le Forem, le secteur du Transport et de la Logistique représente quelque 50.000 emplois en Wallonie et rien qu’au cours du premier semestre 2025, pas moins de 12.500 offres d’emploi ont été publiées. Le hic, c’est que pour les 43 fiches métiers identifiées pour ce secteur par le Forem, un certain nombre sont considérés comme des fonctions critiques (les postes vacants rencontrent difficilement leur public), voire en pénurie (le nombre de candidats qualifiés est inférieur à l’offre). Un atelier d’une douzaine de participants s’est donc emparé de la problématique pour identifier non seulement les métiers en pénurie, mais aussi les nouveaux métiers et ceux qui se transforment profondément, appelant à la maîtrise de compétences nouvelles. Ils ont ensuite choisi de travailler sur deux problématiques pour en faire une fiche projet : la pénurie de chauffeurs de poids lourd et les métiers de la batellerie. Ainsi, pour attirer de nouveaux candidats à la conduite des camions, la Wallonie pourrait améliorer le confort, l’hygiène et la sécurité sur les aires d’autoroutes. Et pour mieux faire connaître les métiers de la batellerie, il y aurait lieu de simplifier les règles administratives venant des différents niveaux de pouvoirs concernant les conditions d’apprentissage pour ces métiers et entamer à ce sujet des concertations avec la Fédération Wallonie Bruxelles.
Tableau de bord de la mobilité : les grands indicateurs marchandises
Une vingtaine de participants ont collectivement exploré l'opportunité de construire un indicateur de synthèse sur l'évolution des coûts (effets) externes (tels que la pollution, les nuisances sonores, les émissions de gaz à effet de serre ou la congestion). Sa création permettrait de disposer d'un outil stratégique pour orienter les politiques publiques, évaluer les effets des mesures prises et sensibiliser au mieux les acteurs du secteur. L’objectif était également de favoriser la mise en commun d'idées pour imaginer de nouveaux indicateurs, élargissant ainsi la réflexion au-delà des coûts externes.
L’atelier s’articulait autour de 3 questions dont chaque sous-groupe a pu tour à tour aborder des pistes de réponses :
- Comment construire l’indicateur ? : disposer d’un indicateur global comprenant des éléments déjà à disposition de l’administration mais aussi d’autres à ajouter (déchets, emploi, ressources, biodiversité…), qui pourra être suivi avec un radar global et par externalité, dont l’unité doit être définie.
- Quelle histoire devrait-il pouvoir « raconter » ? : il semble opportun de présenter les coûts externes comme un coût caché de l’inaction alors qu’il faudra réussir à interpréter ses évolutions et voir ce qu’il ne dira pas mais qui risque d’être imaginé.
- Comment aller plus loin avec lui ? Une méthode globale semble nécessaire pour collecter des données (régionales et locales) dans un format commun afin d’orienter l’action publique à différents niveaux.
Décarbonation, évolution multimodale et sécurisation du transport de marchandises
Fret Forward Wallonia est le nouveau groupe de travail chargé de définir des projets en matière de décarbonation, d'inscription des chaînes multimodales sur le territoire, et de sécurisation du transport de marchandises sur le territoire wallon dans le contexte de la vision FAST 2030. Cet atelier a contribué à définir ces objectifs et priorités pour les deux ans à venir.

